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Danse

Isadora Duncan © Arnold Genthe

Un grand pas en avant

Le XXe siècle ébranle la tradition d’une danse académique. Des créateurs ont bouleversé les corps et graphies d’un ancien monde, celui d’un XIXe siècle engoncé dans une posture bourgeoise. Les danseurs classiques, jusqu’alors mettaient en valeur une technique sublimant seulement le mouvement des membres supérieurs et inférieurs. La liberté des corps était alors taboue. Alors que le couturier Paul Poiret délace les corsets et libère d’un carcan social la gente féminine, sur les scènes occidentales, épaules, bassin, et ventre prennent vie.

Pionnière du genre, annonciatrice de la danse moderne, Isadora Duncan (1877-1927), la belle Américaine, incarne l’émotion spontanée et personnifie la danse libre. Native de San Francisco, elle  traverse les incertitudes d’un temps suspendu à la conscience d’un corps sujet, tour à tour expressionniste, naturel ou théâtralisé. Inspirée de l’esthétique de la Grèce antique, elle séduit par son énergie et sa liberté, la vieille Europe dès 1903. En dansant pied nu, elle exprime le refus de l’académisme du ballet classique. Ses écoles à Berlin, à Moscou ou à Bellevue, ses spectacles à Londres et à Paris et sa mort tragique à Nice, étranglée par son écharpe qui se prit dans la roue de sa voiture, l’ont portée dans la légende des rebelles.

Et puis il y a eu les Ballets russes. Sous l’autorité de Serge Diaghilev, la compagnie met en scène une révolution esthétique en associant à la danse, la peinture, la musique et la poésie. Cette aventure artistique, fondatrice d’un élan qui traversera le XXe siècle, est incarnée par Vaslav Nijinski, celui qui se voulait « le clown de Dieu ». Devant ses audaces chorégraphiques, Auguste Rodin écrit que sa danse révèle « rien que des attitudes et les gestes d’une animalité à demi consciente. » En avance sur son temps, Nijinski crée sur la partition musicale d’Igor Stravinski, en 1913,  Le Sacre du printemps. Un rituel païen précipitant les spectateurs au cœur d’un paganisme iconoclaste et provoquant le scandale.

L’une des centaines de versions du « Sacre du printemps », ici à Londres en 2005 par le Royal Ballet. Aucune photo de la version de 1913 n’existe. Crédits : robbie jack/Corbis – Getty

Dans les années 1970, la chorégraphe allemande Pina Bausch (1940-2009) représente dans la dérision, le désespoir et une subjectivité absolue, la vacuité des relations humaines. Pendant plus d’un quart de siècle, elle recomposera une nouvelle grammaire corporelle en décloisonnant le théâtre et la danse pour proposer un spectacle inclassable. La directrice du Tanztheater de Wuppertal est devenue, jusqu’à sa disparition, la papesse de la scène internationale.

Autre grand nom de la danse contemporaine, le chorégraphe américain Merce Cunningham (1919-2009). Privilégiant le mouvement, la maestria du temps et l’abstraction aux règles convenues, il concilie danse et high-tech. Le maître de la post modern dance s’impose comme la figure « classique » de l’avant-garde. Homme sensible à l’instant présent, il a pour outil l’ordinateur. Modification du temps, stockage de séquences, jeux aléatoires, approche spatiale sont pour l’artiste sources de réinvention permanente. La danse contemporaine dessine dans les mouvements l’aventure esthétique, sociale et parfois politique de notre époque.

Danse post-moderne – Robert Swinston / Merce Cunningham

Il est nécessaire d’inonder le corps d’air et de lumière.

Isadora Duncan