Par Fanny Revault
Située au premier étage d’un hôtel particulier dans le Marais, la Galerie Thierry Bigaignon s’est imposée, en tout juste dix-huit mois, sur le marché de l’art parisien dans le domaine de la photographie. Thierry Bigaignon innove et bouscule en offrant une programmation éclectique et pertinente : du grand photographe Ralph Gibson à la jeune Vittoria Gerardi, en passant par le regard de Renato D’Agostin, le jeune galeriste est bien décidé à promouvoir des artistes aussi bien renommés qu’émergents dont leur l’œil et la culture photographique confirment la qualité de leur travail et leur place au sein de sa galerie.
Vous avez créé en 2016 une galerie dédiée exclusivement à la photographie. Comment et pourquoi avoir choisi cette aventure ?
J’ai commencé ma carrière à Paris en tant que commissaire d’exposition. Avant cela, j’avais créé une affaire qui faisait le lien entre l’art et l’entreprise. L’idée était d’apporter aux entreprises un contenu qualitatif. Petit à petit, j’ai affiné et orienté avec passion le contenu vers la photographie. Après des études de sciences politiques menées à Londres, j’ai étudié la photographie à New York et mon offre s’est adaptée. La photographie est un médium, à mon sens, tout à fait passionnant qui revêt en tout temps une modernité folle et s’adapte à beaucoup de situations et de besoins.
Quinze ans après avoir lancé mon entreprise, j’ai eu envie de me confronter au marché des collectionneurs et j’ai sauté le pas en créant la galerie en 2016, avec le soutien de Ralph Gibson. Il est peut-être l’un des derniers grands maîtres encore en vie et m’a fait suffisamment confiance pour assister au lancement de la galerie, ce qui est pour moi un véritable honneur.
Quelle est votre vision d’une galerie d’art et des missions que vous lui assignez ?
Je n’ai pas la vision d’une galerie qui doit absolument découvrir des talents émergents. C’est une partie de ma mission, mais ce n’est pas la seule. Ma programmation pourrait être qualifiée de « classic with a twist ». Je souhaite présenter la photographie dans sa diversité, avec évidemment, des éléments de surprise. J’aime étonner et m’étonner moi-même. J’aimerais apporter un renouveau, tant dans la façon de gérer la galerie que dans la programmation. Nous avons une programmation suffisamment éclectique à mon sens pour répondre à un certain nombre de besoins. Nous exposons des grands maîtres de la photographie comme Ralph Gibson, Harold Feinstein mais aussi des artistes plus émergeants et conceptuels comme Amélie Labourdette et Vittoria Gerardi qui ont cette capacité à mélanger ces deux approches : photographie et arts plastiques. À côtés d’eux, nous avons aussi des artistes « mythe career » comme Catherine Balet ou Renato D’Agostin qui ont déjà une pratique importante de la photographie.
Renato D’Agostin – Galerie Thierry Bigaignon
Renato D’Agostin – Galerie Thierry Bigaignon
Catherine Balet – Galerie Thierry Bigaignon
Vittoria Gerardi Confine 253 Courtesy Galerie Thierry Bigaignon
Vittoria Gerardi Confine 345 Courtesy Galerie Thierry Bigaignon
Vittoria Gerardi Confine composition2 Courtesy Galerie Thierry Bigaignon
Vittoria Gerardi – Galerie Thierry Bigaignon







Quel rôle entendez-vous jouer dans l’identification et la promotion d’une culture photographique ?
Il existe une culture photographique importante, il ne faut pas la nier mais au contraire la promouvoir. L’un des rôles que je m’attribue est de promouvoir cette culture photographique. Du moins, j’essaie. Je reçois beaucoup de photographes qui viennent me montrer leur portfolio. L’une des choses que je pense déceler lors de ma discussion avec un artiste, c’est si il détient une culture photographique. Il ne s’agit pas simplement de faire de belles images, tout le monde peut le faire. Un photographe doit avoir une culture globale mêlée avec la sienne pour en faire sortir quelque chose de personnel et d’universel. Cette fusion permet de produire des œuvres, même si d’autres qualités sont nécessaires : la ténacité, la pugnacité, l’opiniâtreté, affiner son sillon. Je crois que la plupart des artistes avec lesquels je travaille et que j’admire ont avant tout une sorte d’obsession.
Comme le photographe Ralph Gibson dont l’œuvre témoigne d’une recherche obsessionnelle et fondamentale qui lui a permis de trouver son langage artistique ?
Ralph Gibson est un artiste qui, dans toutes ses œuvres, peut être situé entre l’abstraction et la figuration. Si l’on regarde ses premières photographies du début des années 1960 aux plus récentes, nous remarquons que la forme et le format ont changé, passant de l’argentique au numérique, du noir et blanc à la couleur, du petit format à d’autres bien plus grands ; mais le fond reste inchangé. Il a une obsession, un sillon qu’il creuse, une recherche fondamentale au fond de lui-même qui le pousse à chercher une réponse dans un langage situé entre abstraction et figuration. Cette expression ne peut être dissociée de la photographie. Je crois que cette démarche obsessionnelle est primordiale pour créer une œuvre et qu’il s’agit de la marque des grands.
Selon vous, pourquoi la photographie est-elle importante dans nos vies ?
La photographie est importante au même titre que tous les arts. D’abord, elle est importante pour ceux qui ont besoin de créer. Ce besoin existera toujours, peu importe les moyens, il est inhérent à l’être humain. Une fois que ce besoin est assouvi, il y a comme un dialogue qui se créer avec le spectateur car lui à un besoin qui est celui de s’émouvoir. Je crois que la photographie et l’art en général sont avant tout vecteurs d’émotions. Il ne s’agit pas toujours de nostalgie, de bien-être ou d’extase. Nous pouvons également ressentir un sentiment très proche de la réflexion, de la remise en question.
Harold Feinstein – « A passenger sleeps on a subway train with his head on the seat back, while another passenger reads a magazine and a third looks up from reading », New York, 1947.
Harold Feinstein – « A man on a Coney Island boardwalk bench holds up his hat and an umbrella to provide shade for himself and the woman next to him », New York, 1948.
Yannig Hedel – « De Labore Soli » – Galerie Thierry Bigaignon



Ralph Gibson – The Strip – Galerie Thierry Bigaignon
Ralph-Gibson – The Strip – Galerie Thierry Bigaignon
Ralph Gibson – « The Strip » – Galerie Thierry Bigaignon
Ralph Gibson – « Vertical Horizon Firgate Birds » – Galerie Thierry Bigaignon
Ralph Gibson – « Soho Hotel » – Galerie Thierry Bigaignon
Ralph Gibson – « Vertical Horizon Stairwell Norway » – Galerie Thierry Bigaignon





